"Busy to be busy"

Souffrez-vous régulièrement de ce syndrome de sur-agitation, la plupart du temps contre-productif au final ?

 

·     

J’ai replongé.

Depuis mon retour de vacances, j’ai inexorablement glissé à nouveau dans le syndrome du « busy to be busy »[1] : sur-réactivité à toutes les nombreuses sollicitations (eMails, réseaux sociaux, téléphone, etc.), grande difficulté à me déconnecter, peine à prioriser les choses par ordre d’importance ou d’urgence (tout au même niveau), incapacité à faire face sereinement au flot d’eMails, gros effort pour réussir à prendre du recul et de la hauteur, glorification-valorisation de mon travail par la quantité produite ou l’effort fourni plutôt que par la valeur ajoutée que j’ai donnée, etc.

Pourtant, je suis habituellement reconnu pour mon excellente gestion du temps, pour ma grande efficacité ainsi que pour ma capacité à prendre de la hauteur et à être clair. Malgré cela, j’ai replongé.

Je connais bon nombre de solutions pour sortir de ce syndrome et ai rapidement réussi à mettre en pratique la plupart de ces outils :

·        Planification fine, détermination de plages disponibles pour avoir du temps prévu pour gérer les urgences et les priorités mouvantes,

·        Gestion beaucoup plus structurée des distractions : par exemple ne les traiter qu’à des moments définis, désactiver les alertes, etc.,

·        Le rituel du 90/90/1[2] réinstallé en priorité : prendre, idéalement, 90 minutes par jour durant 90 jours pour réaliser 1 activité prioritaire pour vous (c’est grâce à ce rituel que j’ai écrit mes livres en dehors de mon travail),

·        Prendre soin de moi[3],

·        M’accorder régulièrement quelques instants de détente ou de respiration,

·        Eviter toute procrastination qui me chargera encore plus le lendemain, gestion des tâches peu motivantes avec des outils tels que le Pomodoro[4],

·        Travail mental de recentrage, d’alignement et de motivation,

·       

 


[1] Occupé d’être occupé c-à-d que ma perception de réussite passe par un remplissage systématique, même si parfois inutile, de mes journées


Télécharger
Le billet en version pdf
BusyToBeBusy.pdf
Document Adobe Acrobat 433.0 KB

...

Mais cette fois, malgré l’usage de ces outils, une fois des sensations désagréables ressenties, j’ai continué à subir des nombreux ressentis désagréables: colère, impuissance, frustration, invalidation, peur de ne pas pouvoir faire face, abattement, etc.

Du coup, je me suis interrogé un peu plus en profondeur sur d’autres solutions possibles pour transcender cette difficulté. Je vous livre quelques fruits de cette introspection.

 

J’ai constaté que, dans cette expérience de rechute, hormis quelques émotions de colère, la plupart de mes ressentis ont été des sentiments, à savoir un mélange complexe d’émotions et de pensées ajoutées par mon mental : en effet, la plupart de ces sentiments ne sont pas liés à ce qui se passe exactement à un moment donné (découverte d’une avalanche d’eMails, désir compulsif de répondre à des distractions, personnes qui défilent dans mon bureau, urgences à régler, etc.) mais ils interviennent la plupart du temps parce que, consciemment ou inconsciemment, je rajoute souvent à l’émotion qui se déclenche, une pensée faisant référence à une expérience similaire déjà vécue dans le passé : je pense que…

  • …je n’arriverai pas à faire face,
  •  …je ne peux pas contrôler la situation et je développe une peur de me sentir impuissant,
  • …je ne suis pas capable d’apprendre de situations similaires vécues puis je ressens une frustration ou une dévalorisation,
  • …je ne pourrai pas tenir mes engagements et j’éprouve une panique ou une angoisse,
  • …je ne pourrai pas bénéficier d’un moment de libre que je m’étais réservé et je ressens une oppression, etc.

 

Je n’utilise donc pas le passé pour ce qu’il est : une simple pensée de mon esprit pour quelque chose qui n’existe pas ou plus. Mais je lui accorde une énorme importance qui m’empêche de m’ouvrir à ce que m’offre l’instant présent (comme cadeau agréable ou non). Ainsi par exemple, si je découvre qu’après une demi-journée sans connexion, j’ai une centaine d’eMails à traiter, l’instant présent consiste à traiter ce que je peux traiter plutôt que de me dire, en parallèle au traitement, que je me sens impuissant à tout gérer, que je ne pourrais pas faire ce que j’avais prévu de faire plus tard, que je prendrai du retard, etc. Bref, des pensées qui génèrent des sentiments désagréables et qui sont créés uniquement à cause de références au passé et qui ne tiennent pas compte du contexte extérieur nouveau, de mon être qui a changé, etc. Le processus est le même pour les références que je peux avoir par rapport au futur et aux peurs anticipées, de ne pas réussir demain à faire ou être ce que je désire, etc.

Une attitude intéressante et pleinement vivante  dans cette situation ne consisterait-elle pas à sentir l’émotion, la laisser me traverser et revenir simplement à la tâche qui m’incombe ? Ainsi qu’à ne plus oublier que j’ai à ma disposition 86400 secondes tous les jours ? Que j’ai facilement le pouvoir d’en utiliser quelques-unes pour être totalement présent à ce qu’elles m’offrent : la seule réalité de l’instant, qui, une fois passé n’existe plus ; au lieu d’utiliser bon nombre de ces secondes à refaire vivre un passé illusoire et qui n’existe que comme pensée de mon esprit ou à imaginer un futur hypothétique et ne dépendant pas totalement de moi ?

 

Des balades dans la nature m’ont rappelé qu’il était peut-être sage  de cesser de donner vie à cette arrogance qui me fait penser ou croire que je suis plus fort que l’Univers en pouvant changer l’instant présent, qui me fait penser que je suis plus puissant que l’Intelligence qui crée l’équilibre magique de la Nature !

La piste que j’ai donc entrevue, et plus ou moins réussi à suivre, a été la suivante : me rappeler que le seul vrai pouvoir que j’ai n’est pas celui de changer l’instant présent mais celui de changer la perception que je développe de cet instant et la manière dont je l’accueille ; par exemple voir ou sentir l’opportunité de développer, d’affiner ou de faire évoluer les valeurs qui me sont chères (intelligence, beauté, créativité, etc).

Je peux choisir de croire que, même si déjà 100 fois j’ai vécu ce type de situations de la même manière (car je le vivais de manière inconsciente), aujourd’hui je peux consciemment le vivre d’une façon différente, même légèrement.

 

Si vous vivez des ressentis ou situations analogues à ceux décrits ci-dessus, si vous désirez dépasser le « busy to be busy », l’une ou l’autre des questions ou suggestions suivantes pourraient peut-être vous aider :

  1. Etes-vous obligé de répondre à toutes les sollicitations ? Etes-vous à l’aise avec la gestion des distractions ?
  2. Vous laissez-vous manger votre temps et votre énergie par les projets des autres au lieu de réaliser vos propres projets porteurs de sens pour vous ? Si oui, pouvez-vous vous donner, en priorité, ne serait-ce que quelques minutes par jour pour réaliser une action qui donne du sens à votre quotidien, qui vous fait vibrer agréablement et vous sentir mieux ?
  3. Pouvez-vous (ré-)installer des rituels qui vous permettent de définir quotidiennement une intention nourrissante pour vous ? Et ainsi, petit à petit, remplacer la discipline et l’auto-contrôle par des petits actes quotidiens qui installent de nouvelles habitudes nourrissantes ?
  4. Parvenez-vous à vous donner un peu de temps pour sentir combien vous êtes dur-e avec vous-même en voulant faire face à tout sans aide ? Puis être créatif-ve pour envisager de l’aide ?
  5. Connaissez-vous vos valeurs et ce qui est devenu important pour vous ? Êtes-vous prêt-e à lâcher des habitudes qui ne sont plus indispensables pour vous aujourd’hui ?
  6. Pouvez-vous lâcher ce comportement compulsif qui consiste absolument à remplir du vide perçu par du « faire » habituel qui vous empêche d’évoluer ? Pouvez-vous sentir et comprendre que, paradoxalement, ce remplissage systématique vous vide ?
  7. Pouvez-vous expérimenter le désir d’apprendre comment vivre différemment des moments analogues (et avoir l’agréable impression que vous apprenez des expériences passées, que vous évoluez, même d’un tout petit pas, etc.) ?
  8. Pouvez-vous imiter, ne serait-ce que quelques heures, les petits enfants qui ont l’art de remplir leurs journées d’activités créatives et bénéfiques pour eux ?
  9. ...

·      

Belle semaine !

 

Jean-Pierre Rey, le 2 octobre 2015


 

Partagez si le billet vous a plu et inscrivez-vous à mon info-lettre si vous voulez recevoir hebdomadairement une inspiration !

Et le menu Tout le blog  vous donne accès aux anciens billets en cas d'intérêt !

Écrire commentaire

Commentaires: 0